@carolineplz fait une entrée (14 juillet 2021)
Voici un abstract : cute, many icons intertexting – Bunny revue par là est passée par ici
Please press release (2021)
Cat Zhang, rédactrice adjointe chez Pitchfork, donne le la après avoir cité Caroline Polachek (autrice-compositrice-interprète américaine blanche, née en 1985, découverte dans les années 2000 avec le groupe indie Chairlift et leur hit single Bruises). « Bunny is a Rider est un tube de l’été sur l’indisponibilité », fait remarquer sa chanteuse dans un statement. « Bunny est glissante, impossible de mettre la main dessus. Peut-être est-ce un fantasme, peut-être un problème d’attitude. Mais n’importe qui peut être Bunny, du moins pour trois minutes et dix-sept secondes. »
La chanson comprend une performance caniculaire à la basse du producteur Danny L Harle, ainsi que le premier caméo voix de sa très jeune fille. Qui est Bunny ? Dans la vision de Caroline Polachek, elle est une figure d’indéniable intrigue. Sexy et engeôleuse, elle n’est inféodée à personne.
Brit Dawson, alors journaliste pour Dazed, continue dans la confusion : « Se défaisant de l’avant-pop arachnéenne [gossamer <3] de Pang en 2019, Polachek et le producteur Danny L Harle optent pour un son à la fois commercial et bizarre : une ligne de basse profonde, pleine d’une sève comme destinée au Top 50, un sifflet qui dit “juste ici / viens par là”. »
Tout comme si elle voulait recréer la glissance de Bunny, Polachek passe à travers différentes images (feux d’artifices éclatants, peinture toujours fraîche, vérifications coupantes), ne se reposant jamais assez longtemps pour que l’on devine ce qui suit.
Au refrain, la chanteuse entre dans une nouvelle dimension, passant de narratrice à une vue à la première personne, préférant une prosodie r’n’b à son chant habituellement si svelte et cristallin. Peut-être veut-elle canaliser la volition d’être immatérielle, mais quand elle chante « I’m so nonphysical » cela vient pourtant avec la douleur d’un touchant désir.
L’excitation de la chanson se résume dans sa manière d’éluder la pression de rendre claires ses intentions, pour aller de passade en passade.
SongFacts, site qui donne des faits sur la chanson, littéralement, quant à elleux rapportent ce behind-the-scenes : lors d'une séance d'écriture de deux jours, [Polachek] a improvisé les mots « bunny is a rider » sur le brouillon mélodique initial. Bien qu'elle ne soit pas sûre de la signification de tout cela, elle a aimé ces mots et a continué à rouler avec ; Bunny is a Driver.
« Lentement, ces images se sont assemblées pour former l'alter ego de Bunny », a-t-elle déclaré à Apple Music, « où vous êtes complètement introuvable et où personne ne récupère ses messages ».
Bunny continue de brouiller les pistes.
@carolineplz siffle à nouveau (19 juillet 2021)
j’adore regarder les paroles séparer les gentes comme huile et vinaigre ; celleux qui mangent l’oreiller par l’abstraction (hot, génial, légendes seulement, etc.) et celleux qui veulent les choses être 100% littérales (oops tu détestes l’art)
@charli_xcx
Un tweet parfait.
@DannyLHarle
attends il y a des paroles dans la chanson ?
« hello bunnies » adresse Caroline Polachek live alors que les premières notes pointent le bout de leur museau. La main droite comme la main gauche, index et auriculaires tendus, les deux restants retenus par le préhensile, la main droite oreilles tendues derrière soi la main gauche comme à la recherche d’une source cachée. Plus tard, elle mime apparition et disparition à chaque tournant du labyrinthe.
« Bunny is a Rider a lieu dans le garde-meuble de mon esprit » dit la chanteuse du clip vidéo. « Dans ce labyrinthe, la caméra est le Minotaure dont je suis la Matadore donc c’est parti pour le 1v1. Mais comme je l'ai dit précédemment, je peux me téléporter. » L’outil de téléportation sur l’un de ses biceps étant la strap qui tient le récepteur de son micro sans fil au témoin de mise sous tension rouge. L’amplification de sa voix lui permet de choisir où aller.
Certes, elle lève un lièvre. Mais : huile et vinaigre sont une recette et non pas : un idiome. Ce serait plutôt : huile et eau (oil & water).
L’expression « blood in the water », une vulnérabilité dans une situation de compétition, cède sa place à blood & butter sur la chanson éponyme de son dernier album, paru à la Saint-Valentin 2023 (regardez comme je suis toute mythologicale et wikipédiatée) : sang & beurre, plutôt que suer sang & eau, plutôt que bread & butter, source principale de revenus, choses ordinaires.
De même, à la ligne suivante, oil & water pourrait devenir holy water. Bunny serait-elle une paronomase ? Alors peut-être faut-il suivre une autre track.
eau bénite aux bunnies (2021-)
Sur I believe (2023, toujours sur Desire, I wanna turn into you, son deuxième album sous son propre nom), Polachek interpelle en un whistle une interpolation de Bunny.
Sega Bodega, producteur affilié à PC Music (label créé par A.G. Cook à la fin de la première moitié des années 2010, auquel Caroline doit bien des choses), tease bunny is a garage remix en octobre 2021. Un an plus tard, ayant produit Sunset sur Desire, il apparaît dans le clip où Polachek conduit dans un désert une voiture avec un sticker évocateur. Plus tard, il montre où Bunny se trouve dans la prod de Woe pour Shygirl. Début 2023, il annonce : « no originals in 2023 only remixes ».
En mai 2022, Lil Data, aussi du PC Music-verse, en doctorat de musique programmée via Tidal Waves, lâche une reprise de Bunny « sneaker wave / LoFi ». Bienvenue en Islande. On ne s’attend pas à ces vagues, bien qu’on les entende : l’enregistrement faisant la part belle à un field recording (un enregistrement du champ) de ces courants septentrionaux.
Mood Killer quelques mois plus tard un an plus tôt propose BunBun Like to RideRide. Bunny babille psychédélique une basse acide où les paroles glissent pour s’y dissoudre.
Il utilise ce motif ailleurs. Sur le remix album Dawn of Chromatica, il l’utilise sur sa part du remix de Sine from above. Cœur soigné et signe sine, immortalité de se sentir jeune, rien ici quand on vit ses jours pour les nuits et que l’on se perd éblouie. Bunny est-elle une courbe sinusoïdale ?
Ou alors serait-elle une girlboss qui gaslight et gatekeep ? Dans GIRLBOSS TODAY DJ SET, Mood Killer utilise à nouveau ce motif sur deux mashups. D’abord sur Hollaback Girl x Teenage Dream : c’est mon truc c’est mon truc, tu dis que je suis jolie sans utiliser de palette, nous pouvons danser jusqu’à mourir, à toi et moi l’éternelle jeunesse.
Puis sur Phantom of the UPera : « If it’s up then it’s stuck » dit Cardi B dans UP! – c’est l’expression d’un problème en lingo des états du sud US. Unsettled bunny won’t get stuck et trouvera la sortie. Peut-être est-ce autrement agencé : garde de l’essence dans ton réservoir, tiens-toi debout comme cheffe au portail, fille détale à la vitesse de la lumière.
Enfin, pour l’anniversaire de la sortie de Bunny, Aquairy met sur YouTube un mashup audio-vidéo Polachek-Furtado, Bunny says it right. « [It] came to mind as soon as I heard the SFX in the intro of Bunny, similar to Timbaland’s ad libs on Say It Right. » Je ne peux pas dire que je n’aime pas le jour et la nuit, ni même que je ne saurais pas que je suis en vie et j’aime sentir ceci : Y2K23
Lapine une cavalière (2021-23)
Satellite un mystère
Sans sympathie, mm
N’est rien de gratuit
Lapine une cavalière
Satellite un mystère
Sans sympathie, mm
N’est rien de gratuit
Lapine une cavalière
Sans sympathie, mm
N’est rien de
Bunny est, bunny est, une lapine
Satellite ne la pin
Sans sympathie, mm
Mais je suis à corps perdu
Avoue, avoue, me sens telle là-celle
Avoue, avoue, feux artificiels
Avoue, avoue, cœur-remise en selle
Avoue, avoue, ne lâche pas mon nom
Bunny est une lapine (Bunny est une)
Lapine une cavalière porte en capeline une lavallière. Soit une cravate large et souple qu'on noue de façon à former deux coques bouffantes. On la retrouve dans le hairstyle du clip de Welcome to my island, ainsi que lors des performances lives où Polachek se téléporte entre les pistes de Desire, son deuxième album et Pang le premier.
une carte Magic et des boîtes (2019-2023)
Sur une carte Magic, The Gathering, un fan labor offert lors de son Spiraling Tour, Caroline Polachek y est à la fois nom et image de la carte, catégorie légendaire y en chantant.
Il faut choisir entre deux effets : Minotaur lover - Bunny rider. Sa description, texte d’ambiance, est tirée du closer de Desire, :
sex·ting son·nets under·the·table.
Bunny a dans sa manche un terrier bien cartographié. Sa topographie serait-elle les boîtes du labyrinthe, dont la toponymie à la main transcrite est un easter egg continuel ?
Si Polachek s’est défaite de la gossamer fabric de Pang, peut-être la revêt-elle désormais autrement. Ici qui sait se trouve la solution de continuité entre ses deux albums.
Et si les chien·nes qui l’accompagnaient, du portail à travers toutes ces portes qui sont une porte qui ouvre sur une porte sur une autre porte, n’étaient pas tout autant des lièvres levés, comme Bunny se dresse contre le Minotaure dans le labyrinthe ?
De là le désir de blend les noms des boîtes présentes dans le clip de la chanson, (chacune un easter egg, ce qui va bien avec Bunny) avec la liste de toutes les manières d’appeler les chiens selon Edward II, Duke of York, dans The Names of All Manner of Hounds, datant du XVè siècle. David Scott-Macnab, médiéviste néozélandais, en a fait une recension critique avant que ce manuscrit disparaisse dans une collection privée.
Dans L’Art de vénerie (~1328), William Twiti, expert ès chasse à courre auprès d’Edward II (le Roi d’Angleterre au XIVè siècle, à ne pas confondre avec celui sus-cité) décrit la proie a priori comme un·e « coward with the short tail », qui pourrait se traduire, plutôt qu’une opposition des extensions lièvres et lévrières, comme : on n’a détalé que pour prendre l’avance nécessaire, faisant défiler les résultats de la filature.
Bunny sort de son exil et nous remet en jeu.